MUTUELLES PROFESSIONNELLES : UN AVENIR SOUS CONDITIONS

Conférence Quel avenir pour les mutuelles professionneles ?

Les Mutuelles professionnelles ont-elles encore un avenir ? Question délicate à laquelle Stéphane LECOCQ, Directeur Général de la Mutuelle Générale de la Police (MGP) et Alain GAUDRÉ, Président de la mutuelle Le Ralliement ont apporté des réponses très concrètes lors de la conférence matinale organisée jeudi  29 mars à Paris par le CIMUT. Éclairages.

Apparues au début du XIXe siècle par la volonté de personnes appartenant à la même corporation professionnelle soucieuses de se préserver contre les aléas de la maladie, des accidents de la vie ou de la vieillesse, les mutuelles professionnelles ou affinitaires sont un des piliers historiques de notre système de protection sociale.

Elles sont également, de par leur histoire, leurs combats, porteuses de valeurs mutualistes fortes et d’une certaine idée de la couverture santé. Si il a fait ses preuves et assuré la couverture santé de millions de bénéficiaires, ce modèle est aujourd’hui mis à mal par les grands groupes de protection sociale et assurantiels. Pourtant tout espoir d’indépendance et de continuité de service ne semblent pas perdus.

Lorsque Stéphane LECOCQ prend la parole, le ton est vite posé. « On a tout d’une grande mutuelle et c’est un vrai problème : on en a toutes les contraintes sans en avoir la taille. Mais il faut rester affinitaire, car aller chercher des clients là où on est pas attendu, c’est tout ce qu’il ne faut pas faire ! » En effet, dans un secteur ultra-concurrentiel où la fusion et l’adossement à un groupe apparaissent comme les seules alternatives, la tentation de conquérir quelques parts de marché en s’ouvrant à de l’interprofessionnel, élargissant ainsi l’assiette de départ, n’est visiblement pas la bonne solution pour le Directeur Général de la mutuelle des policiers.

Une offre spécifique

En ciblant un segment précis de population, la Mutuelle Générale de la police et Le Ralliement proposent ainsi une offre de protection parfaitement adaptée et totalement personnalisée à leurs adhérents. Et Stéphane LECOCQ d’enchérir « liquider une prestation, tout le monde sait le faire. En revanche, fournir une garantie santé spécifiquement adaptée aux pathologies engendrées par le poids de la ceinture armée, nous sommes les seuls à le faire ! » S’adapter à un public aux attentes spécifiques, c’est aussi vrai pour les policiers que pour les compagnons du devoir, « notre contrat jeune en formation au sein de l’Association Ouvrière des Compagnons du Devoir avec une aide à la pension sous la forme d’indemnités journalières idéalement conçues pour nos 2 500 à 3000 jeunes du tour de France » souligne Alain GAUDRÉ dont la mutuelle était à sa création en 1972, bien après sa fondation en 1880 par les Compagnons du Devoir en tant que « Caisse de secours mutuel ».

Ce faisant, les deux mutuelles professionnelles rassemblent leurs adhérents autour d’une offre spécifiquement packagée à leurs besoins mais également autour de valeurs identitaires fortes.

Renforcer ses services, conforter ses valeurs

Mais quid de l’avenir de ces acteurs mutualistes longtemps restés confidentiels et pourtant références incontournables du marché ? Les deux dirigeants de mutuelles sont unanimes : le rattachement à un grand groupe, c’est la perte d’identité assurée. Pour la MGP comme pour Le Ralliement, la clé réside dans le rassemblement autour d’un ADN commun et dans la création de valeurs avec ses alliés. « Nous devons créer des alliances, nous retrouver autour de valeurs communes et du service à l’adhérent en jouant sur nos complémentarités. À la MGP nous avons fait le choix du 100 % légitime. Ce n’est pas que du marketing, nous sommes pertinents car ancrés dans le réel. » indique Stéphane LECOCQ qui a rejoint Unéopôle aux côtés de la GMF et du groupe Unéo. Un constat pleinenement partagé par Alain GAUDRÉ qui poursuit son intervention sous la forme d’une plaisanterie très sérieuse « Si vous avez tout d’une grande, nous au Ralliement nous sommes petits mais subissons toutes les contraintes d’une grande ! » Pour la mutuelle qui au fil du temps s’est ouverte aux familles des jeunes compagnons, à leurs entreprises d’accueil puis à tout les publics, face aux mutations du marché et aux exigences réglementaires comme l’ANI et bientôt le RGPD et la DDA, l’avenir passe aussi par de nouvelles ententes. En se rapprochant d’autres mutuelles de tailles intermédiaires « nous avons créé l’UGM Mutuelles Solidaires, ce qui nous a par exemple permis la mise en place d’un contrat d’infogérance et de mutualiser nos frais » poursuit l’ancien compagnon. Une trajectoire qui repose également sur l’affirmation et la justification de sa pertinence affinitaire, « notre métier c’est aussi faire part de nos spécificités qui constituent de vrais avantages concurrentiels » complète Stéphane LECOCQ. Conscient des nombreuses difficultés qui tancent ce modèle mutualiste, Alain GAUDRÉ conclut sur une note positive « Nous nous modernisons, nous investissons les réseaux sociaux, mais même dans la digitalisation il faut afficher nos valeurs ! » sourit celui qui révèle avoir recruter récemment plus de 200 nouveaux étudiants via un célèbre réseau social ! Alliances stratégiques, complémentarité des offres, affirmation des valeurs : peut-être la recette d’un nouvel élan pour les mutuelles affinitaires.